Blogue : mes lectures

Amours swipés

Une poésie tout en simplicité et en authenticité, qui nous amène au cœur de la vie amoureuse de Samuel Larochelle. On lit ses mots doucement, on s’imprègne de ses sentiments, on se laisse guider dans ses dédales amoureux en souhaitant qu’il trouve sa douce moitié. La formule poétique de ce récit très personnel (et je souligne l’audace de l’auteur ici) nous permet d’apprécier chacune des phrases, sans nous presser.

Je me suis reconnue à travers sa vulnérabilité, le thème de l’amour étant universel, peu importe son orientation sexuelle. Mais c’est plus qu’un récit sur la recherche de l’autre, c’est aussi une histoire sur l’acceptation de soi, ses désirs, ses peurs et ses besoins à l’ère des réseaux sociaux et des applications de rencontres qui bouleversent notre mode de séduction.

J’ai échappé mon cœur dans ta bouche, Samuel Larochelle, Stanké

Rite de passage

Voici une courte histoire qui se lit en une soirée, et qui fait découvrir Patrick Senécal sous un autre angle. J’ai lu plusieurs romans de cet auteur, qui maîtrise sans conteste le suspense, l’épouvante et l’humour noir. Ce texte, qui a paru d’abord en 2014 dans le collectif Des nouvelles du père et réédité récemment par Québec Amérique, nous permet d’entrer dans l’univers personnel de l’auteur et de la relation avec son fils.

Alors que la famille Senécal s’apprête à vivre un déménagement (de Saint-Hilaire à Montréal), son garçon Nathan n’accepte pas ce changement. Afin de faciliter la transition, Patrick Senécal lui offre de parcourir la distance entre les deux maisons, pour faire un genre de rite de passage. On accompagne donc les deux protagonistes à travers ce trajet de 38 kilomètres. Cette courte histoire est touchante, et nous donne le goût de réaliser cette expérience à notre tour. Le seul reproche que j’ai à faire à ce récit : il se lit beaucoup trop vite!

38 kilomètres, Patrick Senécal, Québec Amérique

Noyade intérieure

Le roman Je suis le courant la vase est roman difficile, qui brasse. On se glisse dans le monde de la natation de niveau compétitif avec ce sentiment de s’enfoncer dans la vase avec le personnage, le souffle manque au rythme de la narration sans dialogues de cet univers sombre où abus, violence, drogue tournoient. Le personnage principal nage entre les entraînements extrêmes, un coach abusif et contrôlant, mais aussi une vie de débauche (surprenante à mes yeux) avec ses compairs où les limites sont floues et les relations indéfinissables.

En toute honnêteté, j’ai eu du fil à retordre à parcourir la première partie du livre, me sentant aspirer par la noirceur du récit. Mais du même coup, je souhaitais aussi comprendre la complexité du personnage, frôler les abysses avec elle. Marie-Hélène Larochelle est une auteure talentueuse, qui sait utiliser les mots et les phrases pour rythmer des propos sombres, qui viennent nous tourmenter. C’est le sentiment qui m’a envahi tout au cours de ma lecture. Même après le mot « Fin ».

Je suis le courant la vase, Marie-Hélène Larochelle, Leméac

« Humilité, viens m’enlacer. »

D’entrée de jeu, j’étais curieuse d’en connaitre plus sur cet homme qu’on voit beaucoup à la télévision et que ses écrits regorgent les tablettes des librairies. Simon Boulerice, toujours habillé d’un sourire oversize, semble embrasser la vie, faire vivre l’enfant en soi sans pudeur. Je ne saurais définir le genre exact de ce livre, qui navigue entre la biographie, le récit, entrecoupé de réflexions et micro-auto-analyses.

J’ai aimé découvrir l’univers de Boulerice sous sa plume poétique – son talent avec les mots est indéniable –, et le récit porte à la réflexion sur nous-mêmes, sur les facettes que l’on ose montrer, mais aussi sur celles qu’on tait pour respecter certains standards. Sans aucun doute, l’incursion dans le passé de Boulerice permet de comprendre et d’en savoir plus sur le personnage médiatique, celui qui brille sous les caméras à grands coups de « split ». Il s’agit d’un bel ouvrage pour découvrir l’auteur, qui se lit comme un roman.  

Pleurer au fond des mascottes, Simon Boulerice, Québec Amérique

Roadtrip au pays de l’hiver

J’avais très hâte de plonger dans ce nouveau roman d’Andrée-Anne Brunet. Son premier (Ne pas toucher s’il vous plaît) m’avait beaucoup plus, et j’aime beaucoup voyager à travers les livres. C’est donc à bord d’un campingvan qu’on visite les paysages hivernaux de l’Islande en compagnie de Malorie vient de perdre son frère de façon tragique, alors qu’il s’est endormi au volant sa voiture.

Encore engourdie par la peine, la jeune femme trouve un carnet en vidant les affaires de son frère dans son appartement. Dans ce cahier, il a noté les détails d’un voyage marquant qu’il a fait en Islande. Carnet en main, elle se lance sur les traces de son frère, en reproduisant le même voyage que lui. Les paysages de l’Islande, son aride hiver, ses routes sinueuses, Malorie apprivoise ce pays tout en tentant d’apprivoiser une bête plus grande encore : le deuil. Dans ce roman, le personnage principal s’adresse directement à son frère lors de cette épopée en solo. On a droit une histoire émouvante, parfois drôle et douce, qui nous rappelle que la vie n’est pas toujours rose bonbon, mais qu’elle vaut quand même la peine d’être savourée.

Embrasser le chaos, Andréanne-Brunet (Libre Expression)

Les privilèges d’Adam et Marion

J’ai plongé dans ce roman avec de grandes attentes, je l’avoue. Fanny Britt est une autrice de renom qui maitrise la langue, qui nous glisse doucement dans la psychologie des personnages. On les suit, on veut savoir ce qu’il va leur arriver, on s’attache, on tente de comprendre leur désarroi même s’ils ont tout pour être heureux. Et cette lecture nous amène certainement à réfléchir sur nos propres vies privilégiées.

Dans cet opus, on rencontre d’abord Adam, personnalité publique qui a percé grâce à ses talents de chef cuisinier. Lors d’un voyage au bord de la mer, il a un accident de surf, où il passe près de la mort et au passage, broie le genou d’une jeune fille, prénommé Celia. Cet événement le changera sa perception de la vie, qu’il porte lourdement jusqu’à cette érablière qu’il vient d’acquérir. Pendant ce temps, Marion, sa conjointe à l’aube de ses 40 ans, vit également de grands bouleversements intérieurs.   

J’ai beaucoup aimé ce roman, mais je dois dire que je suis restée sur ma faim lorsque je l’ai terminé. J’aurais envie d’en savoir plus sur la personnalité de Celia, qui à première vue semble complexe, mais aussi sur ce que réserve l’avenir d’Adam et Marion.

Faire les sucres, Fanny Britt (Cheval d’août)

Des détours qui valent la peine

Il y a des lectures dans lesquelles on plonge plus facilement que d’autres, parce que ça nous parle directement ou c’est en accord avec ce que l’on vit. Bref, ce sont des histoires, qui même après les avoir terminées, elle nous reste en tête quelque temps. Détours sur la route de Compostelle a été un de ces livres-là pour moi, qui m’a habité pendant un bon moment.

Même si ma réalité est bien différente de Mireille (femme mariée, trois grands fils, vie en parfait contrôle!) son voyage sur la route de Compostelle imposée par sa sœur pas très fiable, ses questionnements tout au long du parcours, ses envies de tout lâcher parfois et ses doutes m’ont amené à réfléchir, m’ont fait sourire, m’ont ému. Au cours des pages, on veut savoir où cette aventure imprévisible pour Mireille la mènera. La plume de Mylène Gilbert-Dumas est juste, son sens du récit aussi. Il fait froid et vous ne voulez plus sortir de vos couvertures? C’est un livre pour se distraire et se laisser porter par les paysages européens.  

Détours sur la route de Compostelle, Mylène Gilbert-Dumas (vlb éditeur)

Douce Almanda

Récipiendaire du prix littéraire France-Québec, le roman Kukum a fait beaucoup parler de lui au cours des dernières semaines. Il était dans ma pile à lire depuis un moment, et j’ai profité du froid de janvier pour me plonger dans ce récit de Michel Jean. Inspirée de la vie de l’arrière-grand-mère de l’auteur, on fait un voyage dans le temps pour découvrir la culture innue et son nomadisme. 

Almanda, la femme au centre de cette histoire, n’est pas Innu de sang, mais de cœur. Elle rencontre un Amérindien nommé Thomas dont elle tombe amoureuse, et quitte sa famille d’accueil où elle ne sait jamais vraiment sentie chez elle pour vivre la vie de nomade. Elle apprendra la culture de son mari, adoptera les coutumes de sa nation et deviendra une Innue d’adoption.

Les forces de ce roman sont de permettre au lecteur de plonger dans cet univers autochtone, de nous faire connaître leur culture, leur territoire, leurs blessures aussi. À travers les yeux d’Almanda et la plume agréable de Michel Jean, on saisit mieux les combats et la répression des peuples qui occupaient le territoire. Bien avant nous.

À lire, parce que le passé nous est raconté avec sensibilité.

Kukum, Michel Jean (Libre Expression)

Humour du quotidien

D’emblée, je dois avouer que j’aime particulièrement l’humour de Stéphane Dompierre. Sa façon de relever les travers de la vie, de mettre une loupe sur les détails épineux (ou parfois des détails niaiseux!) me plaît et me faire rire. C’est pourquoi ce livre, un genre de recueil de mini-chroniques/opinions/réalités, traîne dans ma maison et que je remets souvent la main dessus, même si je l’ai déjà lu en entier. À ce temps où nos aptitudes sociales sont en chute libre (eh oui, un effet de la Covid!), cet ouvrage permet de rire de travers, de nos habitudes bizarres ou tout simplement de nous-mêmes. Dompierre maîtrise l’autodérision, a un humour juste assez grinçant, et ses références me font bien rire. Il faut croire qu’on a pas mal les mêmes.

Marcher sur un Lego et d’autres raisons d’aimer la vie, Stéphane Dompierre (Québec Amérique)

Ah l’amour!

Je vous présente aujourd’hui un roman d’une auteure dont j’apprécie particulièrement la plume, Valérie Chevalier, que j’ai lu pour la deuxième fois parce que, oui, c’est réconfortant de relire un roman et parfois, ça fait du bien! Dans La théorie du drap contour, Florence nous raconte ses différentes aventures amoureuses à la suite de la rupture douloureuse avec celui qu’elle considérait l’homme de sa vie. (Notre premier grand amour, on est tous persuadés que c’est l’homme de notre vie, right?) La singularité de ce récit se retrouve dans le type de narration, alors que le personnage principal s’adresse directement à ses anciennes flammes avec l’utilisation du « tu », comme si elle réglait ses comptes (avec une certaine douceur, disons-le!) avec ces jeunes hommes qui ont défilé dans sa vie. Je me suis reconnue dans le personnage de cette amoureuse en série, dans ses déboires, ses peines grandes comme le monde, ses désillusions, mais son romantisme et ses espoirs aussi.

Une lecture parfaite pour ce mois de janvier en confinement, parce qu’on s’entend que ce début de 2021 nous laisse amplement de temps pour lire nos auteurs préférés, ou en découvrir de nouveau!

La théorie du drap contour, Valérie Chevalier (Hurtubise)